Interview Bertrand Coty
Mayoro Mbaye, vous publiez aux éditions du Panthéon, Contre qui se battre ? La mort des institutions. À quoi attribuer le déclin des institutions dans les nations considérées comme pauvres ?
Vous savez, nous sommes dans des pays dits pauvres, ce qui est totalement faux.
La situation d’indigence des populations trouve son origine principalement dans l’absence d’éthique des dirigeants. Chaque jour dans un pays développé est utilisé un matériau venant de la zone dite pauvre avec à la base un contrat signé par un corrompu. Quelqu’un qui a vendu son âme contre des broutilles. Tout le monde en Europe mange de la mangue, mais la confiture de mangue labellisée, ne porte jamais le nom de la zone de production. C’est valable pour le café, le cacao et tant d’autres produits. Des pays comme l’Italie et la Suisse sont les champions de la production de café prêt à l’emploi ou de chocolat pour de bonnes de fêtes de Pâques. Je prends cette référence pour rester dans l’air du temps, mais si vous allez dans les zones de production les gens sont affamés et attendent l’assistance étrangère.
C’est dans la plupart des cas, un malhonnête qui a conduit la négociation et géré ses propres intérêts plutôt que ceux de sa communauté. Ceux qui dirigent ne croient pas aux vertus et autres bienfaits de la transparence, de l’équité, de l’égalité des citoyens. C’est comme dans un jeu de cache-cache permanent avec leurs concitoyens. Ils érigent le mensonge à tous les niveaux comme une institution et c’est pour remplacer les institutions officielles.
L’institution la plus importante est celle incarnée par un Président de la République élu et dommage dans certains cas extrêmes, il est issu d’un coup d’État sanglant avec des morts dont personne n’est responsable. Il prête serment avant d’entrer en fonction, mais c’est pour oublier les mots et les engagements officiellement prononcés. Alors, quand mentir est la règle appliquée à toutes les situations, la première conséquence sera que beaucoup de décisions ne vont jamais correspondre à la réalité des faits. Ainsi on tue toutes les bonnes initiatives, on enferme des innocents sur une seule base. Vous ne me plaisez pas ! Quand la redevabilité disparait, la confiance aussi s’en va et laisse sur place le désastre et la désolation.
On ne cherche jamais à convaincre ses opposants, mais plutôt, il faut les vaincre grâce à un emprisonnement fantaisiste dont la base est totalement erronée. On manipule les institutions aux ordres, incarnées par des hommes sans probité. Avec un argumentaire tiré par les cheveux, on invente un risque de trouble à l’ordre public pour mettre ses opposants en prison. Toutes les libertés sont en danger. Comment vous voulez vous qu’il y ait la prospérité, je parle surtout de celle des saintes Écritures qui dépasse l’argent et le matériel pour embrasser l’estime, l’affection, l’amour du prochain.
Nous avions des institutions fortes comme la famille, la fratrie, les amis aujourd’hui, elles sont devenues un mirage et c’est pour effacer l’empathie, la solidarité, l’amour et plus grave le goût du vrai. Nous sommes dans la roublardise.
Peut-on considérer que la solidité des institutions est un facteur de prospérité ?
Absolument !
Tout ce qui se fait et ne repose pas sur une base solide ne peut être sérieux. Un exemple, ce sont ces tonnes de fer de la tour EIFFEL. Elles reposent sur du solide. Cette solidité crée la confiance chez ses nombreux visiteurs et donc source de prospérité. Cette tour est une institution. Quand je rapporte cela à nos institutions, elles font bien très souvent le contraire de ce qui est affiché. Quand l’indélicatesse du policier ou du gendarme, devient en institution, le tourisme facteur de richesses disparait.
Selon vous, quels sont les facteurs clés de leur restauration et de leur maintien ?
Il faut ériger la vérité en règle de conduite et sa violation sanctionnée à la hauteur de la faute.
Quand le mensonge et le parjure sont banalisés, il faut un sursaut populaire pour les remettre à leur place avec un risque de chaos c’est maintenant un désordre marqué durant le temps de la contestation, mais comme résultat un chaos à reconstruire. La restauration passera par un retour à nos valeurs anciennes de courage, d’amour propre et surtout de respect de la parole donnée. Notre-Dame sera plus jolie à la suite des flammes, de la reconstruction et de la sécurité gage de sureté. C’est le tableau destruction, restauration et maintien.
L’engagement des citoyens, leur éducation, n’est-il pas le facteur clé de la solidité d’une nation ?
L’engagement des citoyens est indispensable ! Et son efficacité est de nos jours, accentuée par les réseaux sociaux. On peut remarquer qu’on a tendance de plus en plus à faire un amalgame entre instruction et éducation. Ma certitude est que l’école instruit, mais n’éduque pas.
Notre génération a été éduquée à la maison par des parents au sens large du terme et la formation s’est faite dans la vie active avec les épreuves et le saut d’obstacles et le temps finit toujours par produire une expérience. Alors ce sont ces quatre temps qui se suivent et se complètent qui fondent la solidité des nations et génèrent une prospérité partagée. Quand on n’éprouve aucun respect ni une quelconque considération à l’égard de ses géniteurs, comment pourra-t-on respecter les symboles de la république ? Il ne faut pas se leurrer, la source du mal est en nous et par des guides qui se perdent dans leur propre labyrinthe.
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Mayoro Mbaye est de nationalité sénégalaise et réside au Sénégal dans la ville de Dakar.
Je me considère comme un Citoyen du monde pour mon amour des contacts et des échanges avec les autres. J’ai suivi des études en droit avant d’évoluer dans les activités maritimes. Je fais comme les navires. Ils ont un port d’attache, mais ont l’occasion d’arborer plusieurs pavillons durant leurs nombreux déplacements.