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Consommation énergétique et empreinte environnementale des modèles d’IA : le vrai du faux

L’Intelligence Artificielle (IA) révolutionne nos existences à un rythme inédit. Des assistants virtuels tels que ChatGPT aux systèmes de recommandation sophistiqués, l’IA s’immisce dans chaque sphère de nos vies. Néanmoins, cette avancée technologique soulève des interrogations légitimes concernant sa consommation énergétique et son impact sur l’environnement. Cet article vise à démystifier les idées reçues et à examiner de près l’empreinte carbone et environnementale des modèles d’IA, en accordant une attention particulière à ChatGPT.

La consommation énergétique des modèles d’IA : une réalité à nuancer

Les modèles d’IA, notamment ceux dédiés au traitement du langage naturel comme ChatGPT, nécessitent une puissance de calcul colossale. Cette puissance se traduit inévitablement par une consommation énergétique substantielle, particulièrement lors de la phase d’entraînement.

Durant cette phase cruciale, l’entraînement des grands modèles implique le traitement de vastes quantités de données à l’aide d’unités de traitement graphique (GPU) ou tensoriel (TPU). Selon une première étude de l’Université du Massachusetts Amherst datant de 2019, l’entraînement d’un modèle de traitement du langage naturel peut émettre autant de dioxyde de carbone que cinq automobiles parcourant des centaines de milliers de kilomètres. Ou encore, plus de 3 000 trajets aériens aller-retour entre San Francisco et New York, d’après une étude de 2021 de l’Université de Berkeley.

Cependant, ces chiffres doivent être contextualisés. Premièrement, ces estimations concernent les modèles les plus complexes et les plus volumineux. Deuxièmement, les efforts visant à améliorer l’efficacité énergétique des centres de données et des algorithmes d’entraînement sont constants.

La phase d’inférence (lorsque le modèle est utilisé pour générer des réponses), quant à elle, est nettement moins énergivore. Les progrès technologiques permettent d’optimiser cette étape, rendant l’utilisation quotidienne des modèles d’IA plus durable. Néanmoins, l’empreinte environnementale cumulée de l’inférence demeure significative en raison du nombre croissant d’utilisateurs.

L’empreinte carbone et environnementale de ChatGPT

Pour évaluer cette empreinte, plusieurs aspects doivent être pris en compte :

  1. Les centres de données hébergeant les serveurs de calcul consomment d’importantes quantités d’énergie, principalement pour alimenter les serveurs et refroidir les équipements. L’emplacement géographique de ces centres et la source d’énergie utilisée (renouvelable ou fossile) jouent un rôle déterminant dans l’empreinte carbone.
  2. L’optimisation des algorithmes permet de réduire la consommation énergétique nécessaire à l’entraînement et à l’inférence des modèles d’IA. OpenAI et d’autres acteurs de l’industrie investissent massivement dans la recherche pour rendre les algorithmes plus efficaces.
  3. Le cycle de vie des équipements informatiques, de la fabrication à la mise au rebut, contribue également à l’empreinte environnementale. Les matériaux utilisés et les processus de recyclage influencent la durabilité globale.

Les préoccupations croissantes concernant l’IA et l’énergie

Dans un article du New Yorker intitulé « The Obscene Energy Demands of A.I. », Elizabeth Kolbert met en lumière les préoccupations croissantes concernant la consommation énergétique des technologies de l’IA. Elle rapporte que ChatGPT consommerait plus d’un demi-million de kilowatt-heures d’électricité par jour, comparable à la consommation énergétique moyenne de plusieurs milliers de foyers américains.

Alex de Vries, un expert en économie de l’énergie de l’Université d’Amsterdam, souligne les similitudes entre l’IA et les crypto-monnaies en termes de consommation énergétique. Selon ses recherches, si Google intégrait l’IA générative dans chaque recherche, sa consommation d’électricité augmenterait à environ vingt-neuf milliards de kilowatt-heures par an, dépassant la consommation énergétique de nombreux pays, dont le Kenya, le Guatemala et la Croatie.

Sam Altman, le PDG d’OpenAI, exprime des préoccupations similaires, soulignant que la technologie de l’IA nécessite des solutions énergétiques révolutionnaires pour répondre aux besoins énergétiques croissants.

Des techniques avancées pour réduire l’empreinte énergétique

OpenAI, à l’instar d’autres acteurs de l’industrie, met en œuvre plusieurs techniques avancées pour réduire la consommation énergétique et l’empreinte carbone de ses modèles d’IA :

  1. Optimisation des algorithmes : les chercheurs travaillent constamment à rendre les algorithmes plus efficaces, notamment en utilisant la compression de modèle et la quantification afin de réduire leur taille tout en maintenant leur performance, diminuant ainsi les ressources nécessaires à l’entraînement et à l’inférence.
  2. Utilisation de matériel spécialisé : OpenAI emploie des TPU et GPU de dernière génération, plus efficaces énergétiquement que les CPU traditionnels, conçus pour maximiser le rendement énergétique tout en offrant des performances de calcul élevées.
  3. Refroidissement avancé : les centres de données modernes utilisent des techniques de refroidissement innovantes, comme le refroidissement par immersion dans des liquides conducteurs thermiques, pour dissiper la chaleur plus efficacement que les systèmes de refroidissement à air traditionnels.
  4. Approvisionnement en énergie renouvelable : de nombreux centres de données sont alimentés par des sources d’énergie renouvelable, réduisant considérablement leur empreinte carbone associée à l’exploitation des serveurs de calcul.
  5. Optimisation de l’infrastructure : l’optimisation des centres de données pour minimiser les pertes énergétiques et maximiser l’efficacité opérationnelle est une autre stratégie clé.
  6. Recherche sur la durabilité : OpenAI investit dans la recherche pour développer de nouvelles techniques et technologies améliorant l’efficacité énergétique de leurs modèles d’IA ; cela comprend l’étude de nouvelles architectures de modèles et l’exploration de méthodes d’entraînement alternatives moins énergivores.

Des applications de l’IA pour réduire les émissions de carbone

Parallèlement, un article de Frontiers in Environmental Science explore comment l’IA peut être utilisée pour réduire les émissions de carbone, en optimisant les systèmes de production, améliorant la précision des prédictions météorologiques et surveillant la qualité de l’eau en temps réel. L’article mentionne, à titre d’exemple, la mise en place de méthodes de prédiction de trajectoires et d’algorithmes d’ordonnancement prenant en compte les émissions de carbone, dans le but de réduire l’empreinte environnementale au sein de divers secteurs d’activité.

Le rôle des utilisateurs

Les utilisateurs ont également un rôle à jouer dans la réduction de l’empreinte environnementale des technologies qu’ils emploient. En adoptant des pratiques numériques responsables, comme la réduction de l’utilisation excessive des services en ligne et le soutien aux entreprises éco-responsables, chacun peut contribuer à un avenir plus durable.

La consommation énergétique et l’empreinte environnementale des modèles d’IA, y compris ChatGPT, sont des sujets complexes et nuancés. Si l’impact environnemental de l’IA est indéniable, il est également important de reconnaître les efforts continus pour le réduire. La transition vers des énergies renouvelables, l’optimisation des infrastructures et des algorithmes, ainsi que les pratiques numériques responsables, sont des étapes cruciales pour minimiser l’empreinte écologique de l’IA. En tant que consommateurs et entreprises, il est de notre responsabilité collective de promouvoir et de soutenir ces initiatives pour un avenir plus durable.

Plus de publications

Expert-comptable et commissaire aux comptes, Insead, IMD Lausanne, analyste financier diplômé de la SFAF, Stéphane BELLANGER enseigne régulièrement depuis 2014 l’audit, les normes internationales de comptabilité, la comptabilité de gestion ou l’évaluation et la finance d’entreprise. Il est également auteur d’ouvrages, expert et partenaire d’incubateurs d’écoles de commerce et de management. Sa marotte est la déontologie et l’éthique

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